UNE NATION QUI LIT EST UNE NATION QUI GAGNE

Face à la déferlante terroriste, que faire ?

Une déferlante terroriste peu coutumière s’est abattue, ces jours-ci, sur le Mali pourtant éprouvé en la matière de façon à la fois sévère et continue depuis une décennie voire plus. Récapitulons.

Le mardi 18 avril, une délégation des œuvres sociales du président de la transition, conduite par le chef de cabinet de ce dernier, l’adjudant Oumar Traoré (de son petit nom « Douglas ») est attaquée par des hommes armés. Quatre de ses membres sont tués sur le coup. Dont  » Douglas » lui-même, déjà bras droit du colonel Assimi Goïta au sein des Forces spéciales qui ont joué un rôle décisif dans la déposition du président IBK, le 18 août 2020. Une perte majeure donc pour le chef de la transition, qui suscite bien des interrogations notamment celle-ci : comment un spécialiste de la lutte antiterrorisme, réputé pour ses hauts faits d’armes sur de nombreux théâtres d’opérations et bariolé de médailles pour un homme de 31 ans (il est né en 1992) a-t-il pu tomber aussi facilement sous la mitraille de ceux qu’il a toujours combattus ? A l’évidence, avec le profil qu’on lui prête, il ne devait pas se déplacer dans une zone aussi dangereuse que celle de Nara sans une solide escorte. Ce qui ne semble pas avoir été le cas.

Les corps de l’adjudant Oumar Traoré et de ses compagnons d’infortune (le sergent-chef Mohamed Sangaré, agent de sécurité à la présidence, Moussa Touré et Alassane Diallo, tous deux des civils) n’ont pas refroidi dans leurs tombes et leurs collègues et proches n’ont pas fini de les pleurer que le samedi qui a suivi (22 avril) trois événements malheureux simultanés survenaient en différents endroits du territoire national.

Une attaque complexe (combinant véhicules piégés et semble t-il tirs d’obus) a visé la zone aéroportuaire de Sevaré (près de Mopti) qui abriterait des » instructeurs militaires russes » présentés par les Etats occidentaux comme des  » mercenaires du groupe Wagner « . Ceux-là, décrits pour être la cible, n’ont pas été atteints. En revanche une dizaine de civils ont été tués, une soixantaine d’autres  blessés, selon le bilan officiel publié par le gouvernement malien. Qui précise que « les assaillants ont été mis en déroute grâce à la détermination légendaire des FAMA qui ont opéré exclusivement avec leurs moyens ». Ce qui semble contredire une source médiatique étrangère alléguant que  l’assaut a été repoussé grace à « la présence et l’action des casques bleus de l’ONU » particulièrement les Sénégalais.

Le même samedi, d’après le ministre porte-parole du gouvernement, des groupes terroristes ont été neutralisés à Mourdiah (région de Nara) et Boni  (région de Mopti) alors qu’ils « s’apprêtaient à lancer des attaques contre les populations et les FAMA ».

Ä Enfin terminons la série noire du jour par cet hélicoptère d’attaque de la force aérienne qui, en mission de surveillance sur Bamako, s’est crashé sur une maison à Missabougou, tuant les trois membres de son équipage et blessant six civils au sol.

Pour que le tableau soit assez proche de la réalité, il convient de rappeler que l’Etat islamique-si l’on préfère Daech-est en passe de prendre l’entièreté de la région de Menaka sous son contrôle exclusif (seul un cercle sur les quatre qu’elle compte lui échapperait). Pendant ce temps, son rival Al-Qaïda,  à travers ses suppôts locaux Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa, a transformé des parties substantielles  du Nord et du Centre en zones de non-vie, poussant de plus en plus la hardiesse jusqu’à venir narguer les autorités aux abords immédiats de la capitale comme l’attaque de Farabana, à une vingtaine de kilomètres de cette dernière, l’a démontré il y a peu.

Face à une situation aussi calamiteuse, qui plonge dans le désarroi des milliers de nos concitoyens et les jette sur les routes soit de l’exil dans les pays voisins soit de l’asile dans des localités de l’intérieur moins exposées, le refrain habituel sur « les tentatives désespérées de groupes terroristes » en débâcle face  » aux succès de plus en plus éclatants des FAMA » ne rassure plus. Les Maliens  éprouvent un besoin vital de se sentir en sécurité et les mots n’y suffisent plus.

La lutte contre les terroristes de tous bords ne sera gagnée que lorsque ceux-là seront privés de leur mobilité (les motos et le carburant qui les alimente) et de leurs sources de financement internes et externes par une surveillance pointue des transferts d’argent par voie bancaire et autres. Le contrôle de la circulation des personnes et des bagages doit être intensifié sur toute l’étendue du pays et les postes de police, de gendarmerie, de garde nationale doivent être multipliés à cet effet le long des axes routiers et dans les agglomérations. Parallèlement à ces mesures sécuritaires, les moyens militaires doivent faire l’objet d’une mise à niveau constante, particulièrement en ce qui concerne l’augmentation et la formation des effectifs. A cet égard, le programme DDR doit être réactivé et subir un puissant coup d’accélérateur pour intégrer les 30 000 ex-combattants en attente dans les rangs des forces de défense et de sécurité, ce qui n’a pas été fait huit ans après la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation (Juin 2015).

Mais il est établi que la lutte contre le terrorisme, pour atteindre une efficacité maximale, doit être globale, c’est-à-dire s’accompagner de mesures économiques fortes visant à créer des emplois pour les jeunes, réduire la pauvreté, rendre le coût de la vie supportable au plus grand nombre. Elle doit s’appuyer également sur des mesures sociales d’assistance à la santé, à l’éducation, à un habitat décent, un environnement assaini.Toutes choses qui sont des denrées rares au Mali.

Il importe donc que les autorités s’approprient cette approche autant que faire se peut si elles veulent voir leurs efforts, appréciables sous certains rapports-l’acquisition d’équipements de guerre auprès de la Russie- couronnés de succès.

Saouti HAIDARA

Source: l’Indépendant

 

 

 

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